Le dernier roman de Michel Houellebecq nous projette dans un monde futuriste (dans un ou deux millénaires)où l'homme,grâce à la science et ses applications,aurait résolu la question phallique et celle de son désir .Dans un interview donné au journal « le Monde » avant la sortie de son dernier livre, Michel Houellebecq assimile la science à la vérité et pense que « tout ce que la science rend possible sera réalisé ».

Le dernier roman de Michel Houellebecq nous projette dans un monde futuriste (dans un ou deux millénaires)où l'homme,grâce à la science et ses applications,aurait résolu la question phallique et celle de son désir .Dans un interview donné au journal « le Monde » avant la sortie de son dernier livre, Michel Houellebecq assimile la science à la vérité et pense que « tout ce que la science rend possible sera réalisé ». Nous assistons là à un mariage de raison « pour le meilleur et pour le pire » ,le pire où l'on voit resurgir bien sûr cette vérité;car si  « le sujet de la science est le même que le sujet de la psychanalyse » c'est cette vérité du sujet que la science délaisse pour « galoper avec ses petites lettres à la conquête du réel » comme le dit Lacan. Elle le fait très bien, tant et si bien que la fonction phallique nécessaire depuis l'orée des temps à la reproduction est maintenant désuète grâce au clonage .
Des « néohumains » ont été générés par le progrès de la génétique, redupliquant à l'infini comme dans un jeu de miroirs, le même, illusion de l'immortalité du corps . Mais ce que démontre Michel Houellebecq c'est que, malgré tout, les clones sont différents les uns des autres, Daniel 24 se distinguant de Daniel 25 et nous retrouvons là les lois du langage: un signifiant est différent de lui-même et de tous les autres ce qui donne sa raison à l'inconscient qui « ne connaît pas le principe de contradiction ».
Certes, mais il manque l'exception qui serait qu'il existe au moins un signifiant qui se signifie lui-même. D'où cette impression métonymique qui se dégage par le non lestage de la chaîne signifiante ,des « clones sans gravité » pourrait-on dire (en référence au livre de Charles Melman ,Ed.Denoël)
Daniel1 par contre, qui n'est pas un clone mais qui sera cloné bien après sa mort est un bon névrosé de notre temps qui joue de son phallus et des mots en tant qu'humoriste provocateur ,renommé grâce aux mass media et devenu richissime ; il se coltine son désir cahin-caha jusqu'au refus du vieillissement qui le conduira au suicide : car c'est bien un des signes de notre temps de rejeter le dépérissement du corps pour lui préférer le suicide ou l'euthanasie (La Suisse à ce sujet est à la pointe du progrès et serait le « paradis de la mort douce »-Journal Le Monde :p.6 du 24/09/05) . Il lèguera tous ses biens à une secte qui s'avèrera devenir une religion nouvelle: les Elohimites:Plus de père, c'est la « Soeur Suprême »qui fait référence dans un socius tout fraternel où le patronyme est remplacé par un nombre. On retrouve cependant la trace du père dans « Elohim », un des noms de Dieu dans la Bible mais à le prononcer, il perd tout son poids d'exception .
Les clones de Daniel1 vivent dans un monde édénique, réalisation du nirvana bouddhique, monde homéostasique où le principe du plaisir fait loi sans son au-delà, le principe du désir. Seul le chien est le fidèle compagnon du « néo humain » ,lui-même animal cloné du chien premier de Daniel1. La relation à l'autre sexe, si l'on peut dire, à la femme, se fait par écran interposé où s'échangent des informations et curieusement de la poésie .C'est une énigme déterminée par des mots qui va, semble-t-il, remettre en route le désir dans ce monde clos, ce en quoi ce livre est porteur d'humanité ,de cette « essence de l'homme ».


Bibliographie: Jacques Lacan: La science et la vérité .Ecrits .Ed.Seuil p.855 et suivantes .
Michel Houellebecq:La possibilité d'une ile .Ed.Fayard