« le refoulement aujourd'hui », puisque c'est le titre des journées, est-ce que cela veut évoquer quelque chose qui demeure dans les dessous, et donc quelque chose qui demanderait une interprétation, ou bien faut-il entendre ce qu'il en aura été par après coup ? La question est du côté du temps. Mais du côté de l'espace, le terme même d'« aujourd'hui » peut aussi bien désigner un espace infini, qu'un espace délimité par l'existence d'une lettre en souffrance, avec son corollaire, la non-effectuation du refoulement, en tant que l'on désignerait par là une jouissance en trop, et je dirais une jouissance incestueuse.
On entend alors dans cette perspective, que le refoulement par après-coup, c'est-à-dire le véritable refoulement, ne serait possible, qu'à la condition de la reconnaissance d'une séquence, d'une lettre en souffrance.

Quand je me suis mise au travail pour cet exposé, je me suis demandée ce qu'il fallait entendre par refoulement, voire par « refoulement aujourd'hui », comme si le terme même de refoulement comportait une équivoque, ou une indécidabilité.
En effet, « le refoulement aujourd'hui », puisque c'est le titre des journées, est-ce que cela veut évoquer quelque chose qui demeure dans les dessous, et donc quelque chose qui demanderait une interprétation, ou bien faut-il entendre ce qu'il en aura été par après coup ? La question est du côté du temps. Mais du côté de l'espace, le terme même d'« aujourd'hui » peut aussi bien désigner un espace infini, qu'un espace délimité par l'existence d'une lettre en souffrance, avec son corollaire, la non-effectuation du refoulement, en tant que l'on désignerait par là une jouissance en trop, et je dirais une jouissance incestueuse.
On entend alors dans cette perspective, que le refoulement par après-coup, c'est-à-dire le véritable refoulement, ne serait possible, qu'à la condition de la reconnaissance d'une séquence, d'une lettre en souffrance.
« En souffrance » est une expression assez intéressante, car nous ne savons jamais très bien où il se trouve cet élément, est-ce qu'il pèche par présence ou par absence, par dessus ou par dessous, est-ce qu'il est sur l'endroit ou sur l'envers et Lacan nous dit dès le 14 décembre 1955, qu'il s'agit de la même chose : refoulement et retour du refoulé sont l'endroit et l'envers d'un même processus.

Le titre de mon intervention m'est venu d'une lecture d'un séminaire de Melman, dans lequel il propose d'envisager le refoulement sous l'angle de l'éthique, ce que j'ai entendu en première lecture comme quelque chose qui serait que si nous nous situons du point de vue du sujet, la question du refoulement ne peut être envisagée, sans envisager de façon concomitante la question du côté de l'Autre. Un peu comme dans « pas l'un sans l'Autre ». Or comme l'Autre est aussi un lieu, nous pouvons déjà entendre que la question du refoulement, sera aussi une question de topologie.
En effet, il y a dans la question du refoulement une dimension collective, et au delà de ce qui ferait cercle, une dimension culturelle. Cela dit, il m'est apparu impossible de régler cette question du collectif de manière satisfaisante, ou qui ne soit pas heurtée. Je n'ai pu prendre cette question du refoulement que sous l'angle d'une séance d'analyse, ce qui revient entre autre à distinguer ce qui vient à s'imposer à un moment donné dans une situation singulière, et ce qui relèverait de la question du refoulement  pour un nombre donné de sujets liés par un champ collectif.
Cette référence à l'éthique, à propos du refoulement, je l'ai trouvée dans mes lectures, à deux reprises chez Melman.
Il y a évidemment, cette référence à Lacan, pour qui l'éthique de la psychanalyse, est du côté de la question du désir.
Cependant cette question du refoulement est une question difficile notamment par le fait qu'on peut se demander en quoi le refoulement dans le sens du symptôme pose problème. L'accent a été mis ce matin sur le trauma, mais pour ma part je m'étais demandé comment spécifier ce qui ne va pas autrement qu'à travers la question de la demande du sujet ou bien celle du déplaisir, voire de la douleur ?

Pour Freud, la levée du refoulement de la motion pulsionnelle réprimée, devait permettre la satisfaction de ladite pulsion sans provoquer de déplaisir.
Dans son article sur le refoulement, Freud fait du refoulement un problème économique en ceci qu'il localise le processus du refoulement à l'incitation pulsionnelle. Le refoulement est l'un des destins de la pulsion, à côté desquels on peut  nommer la satisfaction, mais avec la prise en compte de la dimension du symptôme, la question du refoulement devient plutôt celle d'un refoulement mal accompli.
Notons quand  même que la satisfaction de la pulsion met en jeu un impossible, dans la mesure où elle se satisfait en faisant le tour de l'objet, sans parvenir à la saisie de cet objet. Cependant c'est sur ce réel de l'impossible saisie de l'objet que du sujet pourrait advenir de la pulsion, qui joue ainsi un rôle essentiel dans la genèse de ce sujet.

Nous pouvons donc dire que pour qu'il y ait un sujet, il faut qu'il y ait une première érotisation, la plupart du temps soutenue dans l'oralité par la mère, c'est-à-dire qu'il faut que ça passe par le discours de l'Autre, un discours tel que le sujet puisse s'identifier. Cette première érotisation, on peut la ramener ici à l'incitation pulsionnelle dont parle Freud. Donc une incitation pulsionnelle, puis dans un deuxième temps, le sujet a affaire à la rencontre d'un impossible pour ce qui concerne les retrouvailles de ce premier plaisir.

Freud dans son texte convient qu'il faut admettre l'existence d'un refoulement primitif c'est-à-dire d'un moment où le Vorstellungsrepräsentanz de la pulsion s'est vu refusé l'accès au conscient à partir de quoi s'établit une fixation : le représentant, nous dit-il, reste alors invariable, et la pulsion lui demeure attachée.
On a l'habitude de dire que ce moment de refoulement primitif concerne le moment d'entrée dans la langue quand il s'agit d'un enfant, mais l'on peut considérer que se met ou devrait se mettre en place un refoulement, pour toute entrée dans un système, une culture, un discours.
Cependant, ce qui cause le refoulement originaire demeure une énigme. La partie signifiante de la représentation, le représentant, cette partie signifiante n'est pas prise en charge dans le conscient, et vient dès lors constituer un trou dans la chaîne signifiante. Ce signifiant exclu désormais de la chaîne, tient lieu de signifiant originellement refoulé, et apparaît plutôt, me semble-t-il, comme une forclusion originaire qui inaugure un réel hors du symbolique, dans la mesure où ce signifiant perdu ne sera pas retrouvé.
Donc un trou dans la chaîne signifiante, et en même temps, ce trou est le lieu de mise en place du phallus que nous allons définir là comme une instance qui limite la jouissance, qui fait bord, un bord phallicisé si l'interprétation du manque dans l'Autre devient sexuelle.
Si un signifiant est désormais retranché de la chaîne consciente pour un sujet, nous pouvons dire que ce qui insiste dans l'inconscient est de l'ordre de la lettre, puisque la lettre comme le phallus fait littoral, bord.
Si c'est la lettre qui est le support matériel du refoulement, c'est elle qui cherche à se faire reconnaître. Cette trace refoulée et qui ne sera jamais retrouvée à l'identique, est le support écrit de ce lieu Autre que constitue l'inconscient. Cette trace perdue, renvoie à la dimension de la faille, à l'incomplétude, au trou originel, un trou qui oriente la chaîne et c'est là que le phallus comme signifiant, comme tiers terme joue son rôle et sexualise la signifiance.
En principe, sauf s'il y a rejet du signifiant du nom du père, comme dans certaines psychoses, la mise en place du phallus qui vient frapper de refoulement tous les signifiants qui s'en suivent ; cette mise en place du refoulement proprement dit, se fait sous le coup d'un signifiant faisant autorité au regard de la chaîne en cause.

Pour aujourd'hui, j'ai suivi le texte de Freud, commenté par Melman dans le séminaire de 1989 sur la névrose obsessionnelle, parce qu'il ne m'a pas semblé possible de faire autrement sous peine de ne rien comprendre.
Si la propriété de la lettre est de faire retour, elle sort du trou et a à y retourner, mais dans l'intervalle il y a un temps, un espace dans lequel la lettre est en souffrance. Lacan parle de retour du refoulé à propos du symptôme, mais il faut dire que selon la nature du symptôme, cette lettre en souffrance ne relève pas forcément de la même topologie.
C'est ce que Freud appelle différents mécanismes de refoulement selon les psychonévroses et il me semble que nous ne pouvons pas, ne pas partir de là, c'est-à-dire de ce qui se passe quand le refoulement a échoué.
Notons qu'avant d'entrer dans ce chapitre, Freud a rappelé comment dans la genèse du fétiche le représentant pulsionnel originaire a été divisé en deux morceaux, dont l'un a subi le refoulement, tandis que le reste a connu le destin de l'idéalisation. C'est pourquoi on peut dire que dans la perversion, le refoulement originaire est contourné par le clivage.
En termes freudiens, le refoulement rate quand il ne parvient qu'à supprimer les représentations et laisse des sensations pénibles, les affects, c'est-à-dire qu'il n'atteint pas son but qui est là selon Freud d'échapper au déplaisir. On assiste alors à des formations substitutives (fétiche, l'animal dans la phobie) et à des formations de symptômes, lesquels, ces derniers, sont des indices du retour du refoulé. Et c'est des symptômes dont je vais parler maintenant.

Ainsi dans l'hystérie : c'est le représentant de la pulsion qui disparaît, qui échappe à la conscience, la disparition de la charge affective étant possible mais pas systématique, des affects pénibles pouvant se maintenir. Cette remarque laisse entière la question de comment, par quelle opération, les symptômes hystériques pourraient céder, si ce n'est qu'il y aurait à revenir à la question du changement de discours et surtout de ce que l'hystérie suçote dans son propos puisque ça se passe plutôt du côté de l'oralité et aussi de ce qu'elle veut maîtriser. Mais je laisse là l'hystérie.

En ce qui concerne l'homme aux loups, l'affect n'a pas disparu : la peur du loup, nous dit Freud, remplace les revendications d'amour envers le père. Lacan fait remarquer que le rôle de la bonne en ce qui concerne l'entretien du symptôme de l'homme aux loups n'est pas négligeable puisque l'enfant subit de la part de Nania une action de séduction à laquelle il se soumet passivement, parce qu'il ne peut pas faire autrement. On voit avec ce cas, comment une incitation pulsionnelle venant de l'Autre, peut entretenir un sujet, soit du côté d'une forme d'élation, ou dans d'autres situations provoquer un enragement en écho au refoulement impossible pour ce sujet.
Ces attouchements peuvent concerner nos cercles, mais il me semble aussi que l'on peut faire un parallèle avec ce qui se passe dans les dysorthographies majeures, dites inguérissables par la science, et pour lesquelles il faudrait prendre en considération l'érotisme en jeu dans les relations mère - enfant, et des divers substituts maternels que la société d'aujourd'hui met en place. Retenons que ces enfants ont affaire la plupart du temps à une présence incessante du corps de la mère sous la forme de sa voix ou de son regard qui se placent, cette voix ou ce regard, sur une page qui aurait dû rester blanche. Cette voix ou ce  regard s'accompagnent d'un discours de la part du maternel  dans lequel rien n'est repérable d'un manque ou de ce qu'il en serait de la fonction de l'objet perdu ;  rien non plus n'est pris en considération de ce qui anime la relation de la mère au père.

Troisième formation symptomatique évoquée dans l'article : la névrose obsessionnelle. Freud s'y perd. Et si l'homme aux rats joue avec 3 lettres, Freud est dans l'impasse quand il cherche du côté du sens. Freud fait cependant remarquer que le mécanisme de défense, qui est défense contre le désir, le mécanisme de défense dans cette névrose, est différent de celui de l'hystérie, en cela que les tendances incestueuses, les pulsions libidinales ou les pensées sacrilèges ne sont pas à proprement parler refoulées. Ce sont des mécanismes d'annulation, d'isolation, ou de dénégation. Et c'est l'une des raisons pour lesquelles on peut préférer traduire die Verdrängung par mise à l'écart, mise hors champ, mise de côté. Le retour d'un élément refoulé dans la chaîne parlée, voire consciente se présente dans cette névrose comme un morceau opaque ayant sur le sujet des effets interdicteurs ou impératifs qui restent inconnus de lui. Ce qui est refoulé s'en retourne au lieu de l'Autre, se trouve refusé et n'est pas repris au titre du Je par le sujet.
Dans ce cas, on considère généralement que le refoulement originaire n'est pas parfaitement accompli ;  le représentant sexualisé étant seulement mis à l'écart, dénié ou annulé. Il faut alors pour ce sujet sans cesse se protéger contre l'objet qui régurgite du trou. Melman précise que certains ne s'en sortent jamais, ce qui est du côté de la reconnaissance de la limitation du pouvoir de l'Autre, et c'est aussi ce dont parle Lacan dans litturaterre lorsqu'il fait la remarque que certains sujets féminisés du fait de détenir la lettre, jouiront peut-être toujours de cette modalité.

C'est dans la leçon qui traite du refoulement dans la névrose obsessionnelle que Melman déplace la question du refoulement telle que Freud la pose, c'est-à-dire pour Freud en termes économiques : à savoir que Freud parle du refoulement à partir de l'incitation pulsionnelle.
Melman déplace la question du côté de l'éthique, c'est-à-dire qu'il  réintroduit la question du désir : en effet si le but du refoulement dans l'économie psychique est d'éviter le déplaisir et que cela donne lieu à un processus automatique, en termes éthiques la question devient dans le texte de Melman à ce moment-là celle de savoir quelles seraient les conditions qui permettraient une satisfaction de la pulsion sans provoquer de déplaisir.
Pour ma part je formulerais la question aujourd'hui plutôt ainsi : quelles seraient les conditions autorisées pour qu'il puisse y avoir au minimum un refoulement correctement accompli, c'est-à-dire qui n'écrase pas le désir, et dont le résultat pourrait être la cessation d'une jouissance incestueuse, de ce rapport sexuel ?

Pour revenir au séminaire précédemment cité, si dans la névrose obsessionnelle, le sujet à sans cesse à retrancher de son propos ce qui se présenterait comme sexuel, il laisse du coup la parole à l'Autre. Il ne s'autorise de lui-même qu'à la condition que ce soit l'Autre qui parle, et il se fait ainsi l'instrument de ce qui parle dans l'Autre. On est donc proche de cet embarras que nous cause cette formulation de Lacan que le désir de l'Homme, c'est le désir de l'Autre, et dont Jean-Paul Hiltenbrand a commencé à parler l'année dernière.
Melman nous dit toujours dans cette leçon que le problème est bien là, autour de la reconnaissance du désir, et qu'il faut se méfier. Voici ce qu'il nous dit : porter le problème sur l'éthique peut être une tentative de s'affranchir de la question économique. Or la question économique, ce n'est pas seulement celle de la pulsion, c'est me semble-t-il, celle où le sujet a à y mettre du sien.
Pour le dire autrement, dans le débat de savoir si le problème du refoulement est un problème collectif (avec son minimum : le sujet et l'Autre) ou un problème concernant chaque sujet de façon singulière, la question relèverait en dernier ressort, de la singularité.

J'avais dit au cours des préparations mon doute à participer à ce travail et je pourrais rajouter une certaine répugnance à y participer encore, à soutenir encore une forme de jouissance pour laquelle ce qui m'apparaît symptomatique est l'incitation pulsionnelle qui fut mise au départ et qui est venue comme cela contaminer le travail, positivant la particule élémentaire du discours analytique, ainsi aussi, qu'une partie du social, si l'on peut dire, parce que je ne sais pas très bien ce que l'on est autorisé à appeler social.
En effet, peut-on parler de social quand  la réalité à laquelle on se réfère n'est tissée que du discours analytique ?
Dans le même fil, s'il est arrivé à Melman de dire que le mot femme peut faire nom, n'est-il pas ce nom, dans le cas où il se sustente seulement du discours analytique, n'est-il pas ce nom, essentiellement tissé d'imaginaire, c'est-à-dire du registre du fantasme ?
La formule qui consiste à dire qu'une femme se trouve hors discours, ou a à se tenir hors discours, avec ce paradoxe qu'en même temps c'est le discours qui la place ; cette formule semble du coup plus juste en ce qui concerne le réel en cause, que ce soit celui de la question de l'analyse, ou que ce réel soit celui du rapport homme /femme.

On ne peut pas traiter de la question du refoulement sans mettre en jeu la question du désir et, c'est ce que dit mon titre sans même que je m'en sois aperçue.

Il convient de douter sur ce à quoi on a affaire.
Le désir de l'homme est le désir de l'Autre, mais nous dit Melman, c'est dans cette chicane que le problème se trouve. Et dans certaines structures, on observe que l'élément refoulé est refusé à la reconnaissance par le sujet, dès lors l'élément en cause est renvoyé dans l'Autre sous la forme d'un « c'est pas ça ». On a par exemple la phrase  « ce n'est pas ma mère à laquelle je pense », et cet autre exemple, de celui qui n'existe pas et qui appelle sa mère, ma femme sans même s'en apercevoir. Mais pour coller au dernier texte entendu, on peut aussi évoquer celui qui annonce qu'il est mort. Au delà de l'énoncé nous pouvons d'une part, repérer comment il y a à cet instant de la parole prononcée, une identification à l'objet et au signifiant qui a circulé dans le discours général, et d'autre part supposer, mais rien n'est sûr, supposer pour ce sujet le registre d'une demande qui ne se sait pas. Lacan nous dit que ces propos autour de la mort sont suspects, et que cela concerne peut-être autre chose.

Alors que dire ?

D'une manière générale il nous faut évoquer concernant le devenir du refoulement la question de savoir ce que veut dire homme aujourd'hui, ce qui est une question sexuée ; comment un homme se débrouille avec son fantasme, et cette remarque qui concerne l'analyse, en tant que pour celle de l'enfant, il est particulièrement nécessaire d'accorder une place à la parole du père, et d'avoir nous-mêmes, quand  nous recevons un enfant, son autorisation.

D'autre part et en point hors ligne, si j'ai évoqué à plusieurs reprises des questions qui tournent autour de l'école, c'est parce que ici et là, quelque chose demeure qui ne va pas, du moins me semble-t-il, et qu'il n'est pas sûr que cette journée permette à des sujets liés par un champ collectif d'être un peu plus sereins. En effet à quoi va-t-on reconnaître qu'un discours n'est pas incestueux ou perverti, ne rend pas fou, voire anéantissant ? Ici ce qui fait retour n'est pas lié : si c'est la question de la répression, comment agir sur un discours qui laisse hurler un enfant enfermé dans un placard et que des voisins entendent, et qui en laisse un autre se mourir caché à la cave et que les voisins entendent aussi gémir ? Comment traiter une situation clivée, où s'opposent  d'un côté : pouvoir et son retour l'impuissance, et de l'autre : exclusion et son retour l'impossible. Quel discours produisons-nous pour qu'il en soit ainsi ? Il y a ce que nous avons laissé de côté, question déterminante sur le résultat ; il y a ce qui est provoqué chez l'autre et dénoncé du même mouvement ; mais cela est-il conscient ?

Et du côté de « papludun » - « papludun » étant le signifiant du séminaire de Lacan venant désigner la limitation de la fonction érotique, selon la dissymétrie homme/femme ? Notons que si autrefois, une femme pouvait être considérée pour être le symptôme d'un homme, aujourd'hui, quand  on la diffame, cela ne semble plus être le cas.
On a vu que l'élément en cause peut être refusé, et que du coup le sujet  attend que l'Autre parle sinon il dit ne pas pouvoir, mais que l'Autre parle dans le sens d'une invitation et c'est refusé, ou que l'Autre parle dans le sens d'une quelconque réponse, alors ça ne va pas, parce qu'il y aurait là une présence, il y aurait une incitation, du moins c'est comme cela que je l'entends. C'est bien là l'embarras qu'entretient ce sujet, comme l'homme aux rats autrefois avec Freud, puisque derrière la demande adressée à Freud, ce qui était visé c'était justement ce manque ou ce trou dans l'Autre, trou mal foutu pour le sujet.

Melman le dit : la demande dans son fond est demande de rien. Et remarquons que « rien » est un anagramme de « nier », c'est-à-dire qu'au delà de la négation infinitive de « nier » qui peut être aussi la trace minimale d'un sujet du désir réduit au silence par nécessité, au delà de cette infinitive, nous pouvons aussi entendre, comme cela a été martelé pendant des années, qu'à la demande il n'y a pas d'x pour y répondre.
On entend aussi que si l'Autre maternel ne vient pas de nouveau érotiser le système, ce sujet fera peut-être l'épreuve de ce qu'on peut appeler le manque réel de signifiant dans l'Autre. Autre social peut-être ; mais derrière, hormis la question de ce qui peut faire autorité dans la chaîne et du coup autoriser, n'est-ce pas la question de l'Autre du langage qui est convoquée en dernier ressort, et cela avant même le temps de l'incitation pulsionnelle, source secondaire du symptôme, au niveau où nous sommes ? Ce temps de l'incitation pulsionnelle ne serait donc pas le point où le discours en tant que représentant de la représentation, en tant que refoulement, le point où le discours si c'est le discours analysant, le point où le discours se trouve, selon l'expression de Lacan, disqualifié et renvoyé d'où il vient.

Si cette logique de la lettre est implacable, c'est qu'elle est le véritable diviseur pour le sujet, le renvoyant où c'était : wo es war, soll ich werden. Y consentir, accepter ce désêtre et  revenir à ce néant primitif, à supposer que ce soit possible, y consentir n'en tamponnera peut-être pas la douleur, celle de n'être pas. Mais au moins entend-on qu'il s'agit bien là avec la lettre d'une affaire de place, de topologie, et que dans cette topologie si le corps souffre, c'est que le point de départ, celui qui noue le réel au symbolique, n'est pas, en son lieu, ce qu'il aurait eu à être.  
Lacan, est différent de lui-même, quand  il monte sur la scène. Cela nous renvoie à ce qui a été rencontré dès le départ, avant que la tiercéité ne s'en mêle, c'est qu'il n'y a pas de continuité entre le discours analytique et le reste de l'existence. Ce réel rencontré, on peut peut-être le dire aussi comme celui d'une béance entre le a et le un, mais c'est aussi une forme de non rapport.

Voilà ce que j'ai pu dire à propos de cette question du refoulement aujourd'hui.

Il est possible qu'il faille un temps pour que la lettre accomplisse ce trajet, signifiant pour qui la détient ou l'a dérobée un mortel destin. Se conçoit aussi qu'il faille le temps lorsqu'elle est à côté de la boite : ce cube réduit à cette face carrée à l'intérieur de laquelle on trouve une fente.
Cela n'empêche que nous pouvons dire en suivant Lacan, que le paradoxe est que s'il faut le discours analytique pour articuler l'objet a, il le faut à condition de se taire ; et peut-être même parfois à condition de s'abstenir auditivement. Et j'ajouterais : se taire, au moins dans cet axe de la demande de « papludun », car ensuite, ou à côté de « papludun », il y a ce qui nous échappe, ce qui n'a pas été pris par le regard en arrière de la scène. Et par ailleurs, il y a aussi ce que le restant du monde nous oblige à travailler.

Bernard Vandermersch :
Qu'est-ce que vous voulez dire par cette proposition d'un refoulement correctement accompli ? Il y a un embarras qui tient à cette division, d'une part cette visée de Freud d'une levée du refoulement et d'autre part ce fait que le sujet tient son existence justement de quelque chose qui a été refoulé. Ce matin, Claire Pouget parlait de passer du refoulement à la métaphore. Pour Lacan, le refoulement est ainsi à situer comme une opération de métaphore première. Une façon d'entendre ce que serait alors un refoulement correctement accompli tiendrait à une façon de parler qui maintienne la dimension métaphorique du langage, un usage de la langue qui fait place à ce qui de toute façon ne peut être dit et qui refuse cette désinvolture à l'égard du langage, le non-engagement du sujet dans la parole.

Odile Fombonne :
 Ce que j'entendais par correctement accompli posait la question du désir et de l'inceste, un refoulement qui laisse place au désir, qui ne l'écrase pas, et qui en même temps ne soit pas de la jouissance incestueuse.